La distinction classique science-technique
Dans la Grèce antique la science est purement spéculative c'est-à-dire qu'elle n'a pas pour vocation de servir à un quelconque développement technique mais plutôt de satisfaire le besoin de compréhension à l'égard de la Nature et de fournir une conception du monde.
L'idée selon laquelle il y aurait à l'origine une liaison nécessaire entre la science et la technique est une illusion. D'une part les techniques s'étaient développées de façon empirique bien avant que l'on soit en mesure d'expliquer la cause des phénomènes produits.
D'autre part, et c'est l'argument de Platon, une liaison entre science et technique est préjudiciable à la science, car elle risque alors d'être uniquement considérée en fonction de son intérêt technique. Platon met en garde contre cette vision réductrice de la science qui aurait pour effet de négliger la recherche pure.
Il le dit notamment en ce qui concerne les mathématiques : Si on laisse l'arithmétique aux mains des marchands et la géométrie aux mains des arpenteurs, jamais ces disciplines ne progresseront car ces gens n'ont besoin que de connaissances pratiques et toujours les mêmes. Dans ces conditions aucun progrès n'est possible. Aussi insiste-t-il sur la nécessaire séparation entre cette science appliquée aux besoins et la science mathématique elle-même qui doit garder son autonomie si elle veut survivre en temps que science.
Dans le livre VI de La République, il écrit :
"Il conviendrait donc de cultiver cette science [l'arithmétique] non pas pour la faire servir aux ventes et aux achats, mais pour faciliter la conversion de l'âme du monde de la génération vers la vérité et l'essence"
"Par conséquent si la géométrie oblige à comtempler l'essence, elle nous convient ; si elle s'arrête au devenir, elle ne nous convient pas"
Ce rapport entre la science et la technique tel que Platon l'évoque est tout à fait actuel. En effet les sciences d'aujourd'hui deviennent peu à peu des "technosciences", d'où un problème concernant l'indépendance de leur statut et leur rôle dans la .société.
N'y-a-t-il pas un risque pour la science actuelle à se mettre ainsi au service des besoins et à devenir par là-même technicienne ?